• La Comtesse sanglante (Illustration de Victoria Francés)


    Erzsébet Bathory, la Comtesse sanglante 

    Toutes nos images littéraires de femme fatale sont bien sûr issues des mythes de Méduse et des Sirènes, pour ne citer qu'elles, mais elles ont aussi pour corrélatif historique une femme réelle qui a suscité de nombreuses légendes et s'est fait un nom qui nous évoque les raffinements de la persécution : la Comtesse de sang, le monstre national hongrois, Erzsébet Bathory.
    A l'instar de notre Gilles de Rais, Erzsébet est devenue au XVIIème siècle un personnage mythique, celui de la perverse tueuse à la beauté éternelle.

    La revue littéraire Requiem lui a même consacré un ensemble d'articles édifiants autant sur le plan historique que poétique car ils établissent clairement l'influence d'une telle figure sur la fiction fantastique.
    Toutes les femmes fatales imaginaires doivent plusieurs de leur traits et de leurs paradoxes à la cruelle comtesse car l'Histoire n'a que rarement perpétué l'image de telles femmes.

    On sait d'elle qu'elle naquit en 1560 au sein d'une très illustre famille d'aristocrates hongrois, qu'elle était réputée pour sa merveilleuse beauté mais aussi pour ses exigences et son orgueil et qu'elle fut jugée en 1611 pour les tortures et les meurtres de près de six cent jeunes filles attirées et séquestrées dans son château de Csejthe.
    Elle fut condamnée à la décapitation mais son rang lui permit d'implorer la clémence du roi et elle fut finalement emmurée à vie dans son château où elle mourut « soudainement, sans croix et sans lumière, le 21 août 1914, à la nuit. »[1] 
    Là où la fiction naît de la réalité, c'est lorsque l'on découvre les extraits du procès où sont évoquées l'origine et la nature des supplices que l'on impute à la comtesse et qui s'apparentent plus volontiers à des sacrifices.
    La légende fera le reste pour la faire entrer au panthéon des créatures démoniaques et tentatrices. Les versions les plus poétiques en font un monstre à la vanité dévorante qui se servait de sang humain frais pour onguent de jeunesse et qui dût pour cela créer « la célèbre Vierge de Fer (...) ancien appareil de torture de l'Inquisition (...) la « Comtesse Sanglante » pouvait alors prendre son bain de jouvence et conserver ainsi sa célèbre beauté. »[2] On dit aussi qu'elle fut emmurée avec pour toute compagnie un miroir afin de pouvoir contempler sa beauté désormais déclinante.

    « Cette figure terrible, un des premiers « serial killer » connu, est peut-être d'autant plus spectaculaire qu'il s'agit d'une femme. Et une femme appartenant à la noblesse slave dont le charme romanesque parle à nos imaginations d'enfants du moderne occident. Erzsébet (...) est une icône propre à provoquer le frisson, mais un frisson qui contient à la fois le noir et le blanc, la terreur et le délice. »[3]
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>Cette femme fatale légendaire a inspiré bon nombre d'œuvres littéraires d'inspiration romantique et deux romans qui lui sont entièrement consacrés.[4]
    Mais on en retrouve l'ombre partout où la femme excessivement belle est soupçonnée d'être un suppôt de Satan, puissant et aliénateur.
    <o:p> </o:p>
    Lorsque la séduction raffinée et spirituelle du personnage féminin s'entoure de mystère et devient avide au lieu d'être convoitée, les rôles s'inversent.
    On songe alors à Erzsébet, courtisane implacable, qui voulait élever sa beauté au rang de celle des déesses en se vautrant dans le sang tel un animal qui aurait terrassé sa proie.
    Pour nous, la beauté féminine est l'inverse de la prédation et de la violence.

    Ligeia


    [1] Machecourt, D. « Erzsébet Bathory » Requiem no 7. avril-juin 1998, (p. 22)
    [2] Ibid. (p. 19)

    [3] Silhol, L. Editorial, Requiem no 7 op. cit. (p. 3)

    [4] La Comtesse sanglante de Valentine Penrose (Mercure de France, Paris 1962) et La Comtesse de Sang de Maurice Périsset (Pygmalion, coll. Bibliothèque infernale, Paris 1975)



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