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Le Sillon
Le Sillon"L'invisible araignée de la mélancolie étend toujours sa toile grise sur les lieux où nous fûmes heureux et d'où le bonheur s'est enfui."
<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p></o:p>Mes pieds aimantent le sol en ce petit matin boueux...
(Boleslaw Prus)
Une étrange brume, faite de songes sales et de poussières de lune attardées qui peinent à réfléchir une quelconque lueur. De la fenêtre, j'aperçois le chemin qui serpente vers ailleurs, il s'enfonce et se gomme au lointain dans les chimériques décors que je ne fais qu'imaginer, toujours... Ce sillon de hasard parcourt la terre humide comme une cicatrice arbitraire, une plaie d'où pourrait sourdre un flux de liberté... Fuir !
Fuir au cœur du fuligineux brouillard que le froid raconte à la terre encore chaude...
M'évaporer au gré de ces minuscules pigments volés à la mousse, au sol murmurant, aux écorces fragiles...
Fuir et me fondre aux nuées, cocons de saveurs ou de colère, voyageurs du Très-Haut semant le mystère jamais vraiment révélé. En ces esquisses angéliques d'un pinceau hasardeux et virtuose, j'ai souvent rêvé de me déliter. Telle la sirène du conte rendue aux franges infinies de l'écume des sept mers, rendre mes sens à l'éther... voyager pour l'éternité. Devenir nuage, messager des saisons, apportant des courriers réguliers déposés aux confins du monde par ses pluies douces ou salées...Me faire pleuvoir sur le monde encore endormi, me fondre aux torrents, caresser languide de mes doigts de sève ou de mes eaux bruissantes les carcasses et les fleurs qui le jonchent. Fuir...
Mais pour où ? Pour qui ? Pourquoi ?
Tous les chemins mènent à Rome, dit-on, qu'ils soient longs ou brefs, qu'ils offrent de larges plages ombragées où l'on peut se reposer et goûter à de doux instants de plaisir, qu'ils soient semés d'ornières et de ronces griffues. A l'horizon gris se dressera inévitablement l'autel, l'ultime refuge, la dernière geôle, selon qu'on l'appelle de ses vœux ou qu'on le redoute.
Au reflet dans la vitre mes yeux s'accommodent lentement... La balafre noire et poudrée au-dehors se superpose à mon visage. Un leurre me direz-vous ? Non... pas cette fois. De ma face blême entaillée de futur, le masque s'échappe un instant. Je n'ai plus de sourire, plus de regard, juste cette étroite ligne dérangeante que l'on ne devine qu'au miroir... les scories d'une âme souillée d'angoisse. Que la chair est faible !
En vie, en amour, en envie, sans détour... la volonté primale de demeurer figé dans la matrice du temps. Suspendre les moments de douceur, arrêter les funèbres tic-tac, refuser que le soleil se lève, rester soi, ne pas se confondre dans l'infini mouvement universel, l'abîme grouillant et composite du Grand Cycle.
Retenir l'hémorragie du Temps... seuls le rêve nocturne et ses chimères, pensées filées, dévidées le long du jour le peuvent encore... l'espace d'un instant, celui que chacun leur accorde.
Mais j'ai tant de chemins à parcourir encore... rire, rêver, imaginer.
Ma vie m'échappe d'habitude, je me réfugie dans mon imaginaire, un doux refuge, un berceau d'illusions chatoyantes. Des jours où l'enfance me ramène au pays imaginaire dans lequel tout est possible. Je chevauche une étoile qui s'en va faire le tour des planètes et au-delà, je ramasse des pierres de lune et je joue à la marelle sur des nuées océanes à la barbe des dieux et des Titans engourdis. J'invente des mots qui fondent en bouche comme des friandises volées, des monts et des merveilles infinies, des décors de voluptés tendres ou interdites...
Et puis il y a des jours comme ce petit matin où je ne vis que ma vie, l'oubli de la lumière des tendres jours n'éclaire plus le chemin vers la mort. Des « jours sans » où l'enfant en moi dort, où la mélancolie me mord. Des jours et des nuits où se dévide devant mes yeux impuissants le fil de notre destinée et nous, spectateurs avertis, nous ne pouvons pas l'ignorer. Nous ne pouvons que contempler l'araire qui laboure notre horizon, écaillant de son soc profond les grès et les argiles de notre épiderme si dérisoire...
Frayez donc ! Et ébattez-vous, pénétrantes toxines, grains échappés du Grand Sablier !
La Nature est le grand témoin, nous des passagers de fortune ou d'infortune.
Le vent se réjouira de jouer dans nos chevelures, la terre frémira de nous sentir sur son ventre, l'arbre nous saluera aussi de ses multiples parures... Et à chacun son tour ! L'Eternelle séduira d'autres âmes.
L'invisible Moire nous perfuse et nous gruge. Les jolies poupées peuvent bien valser, sourire et s'aimer, leur sang ne bat plus aux tempes, les bourrages de chiffons s'effilochent, les fils de leurs poignets tendus vers les cieux luisent à la lumière de la lucidité, comme la toile de l'araignée que l'on ne voit qu'à l'aurore, parsemée de rosée, entourée parfois du plus majestueux écrin de fleurs aux doux pétales gorgés de vie. Sous la rose envoûtante, les épines croissent, l'insecte se débat vainement dans sa prison emperlée de lumière, les spectres de nos souvenirs viennent hanter nos instants de bonheur.
Entaché de réel, tout saigne sur la beauté du monde.
Notre cœur ou notre chair saignera tôt ou tard.
Toute voix est un bruit,
Toute image éblouit,
Tout sourire est grimace,
Toute caresse me révulse.
Ma chair saigne aujourd'hui...
Ligeia
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Tags : solitude, Lune, rêve, mort, douleur, Spleen, angoisse, ange, fantasme, étoile, larme, sang, enfance, imagination, araignée, nuage, fuite, mélancolie, sillon, cicatrice, plaie, chair
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Commentaires
coucou
alors bien passé cette reprise? merci de ton gentil com bon dimanche mon amie gros bisoussuperbes textes
j'imaginais des photos plus bucoliques. mais je suis une incorrigible nostalgique. kiss@ Bruno
Merci, pour une fois, c'est le vent du nord qui m'envoie un peu de soleil... tu as mille fois raison au sujet de l'enfant qui vit en nous, nous devons garder notre imagination et nos élans pour ne pas sombrer. C'est aussi ce que je voulais montrer dans ce texte. Lorsque l'enfant en nous cesse de nous guider, la vie est terne, parfois douloureuse. Heureusement, je pose assez souvent des yeux d'enfant sur la vie. Bises à toi.@ Dit, @ Sandy
Merci pour vos petits coucous, je les ai vus trop tard alors je vous souhaite une belle nuit et vous remercie de vos visites amicales, j'en suis toujours touchée. Bises.@ Wallis
Bienvenue ici... je t'ai rendu visite également et t'invite à parcourir quelques pages pour des images plus "bucoliques" (sourires) J'apprécie ton passage amical. Au plaisir...hello ligeia..
j'suis de reout sur mon ile de beautée!!mais je me suis tromper j'ai repris le bateau a nice et non pas a marseille!!!j'espere que tt ta petite famille se porte bien!!!moi ce matin je vais faire le vaccin contre la grippe!!!j'ai pas encore envie de me le choper comme l'annee derniere!!!gros bisous a tres bientot13wallisLundi 12 Novembre 2007 à 10:24mélancolie
elle est douce quelques fois, mais aussi éprouvante parfois, je crois qu'on s'y réfugie pour oublier quelque chose ou quelqu'un... gros bisous ligeia, j'espère que ça va :(@ Sorenza
Aaaah ! Ne va pas confondre Nice et Marseille, dis ;-)) J'espère que le mal de mer s'est dissipé et que tu as bien repris pied. Merci de prendre des nouvelles, tout va bien (mais je ne le dis pas trop fort !) Bisous.@ Dit
Mais de rien... c'était tout à fait sincère. Je suis heureuse d'avoir croisé ta route. Bises.@ Sandy
Dur labeur, ça tu peux le dire... surtout en début de période comme ça. Mais bon, je m'échappe ici parmi vous... Merci et bon courage à toi aussi. Amitiés.@ Wallis
De rien, c'est gentil de passer ici et de ne pas me craindre ;-)) je souris et ne mords pas... tout est esthétisme. Bisous à toi.@ Epouvantail
Le refuge de l'imaginaire... douceur ? Oui, souvent pour ma part. tu as de la chance de le connaître et d'en avoir conscience, pense à le préserver longtemps. je m'y efforce également. Amitiés.@ Jalouse
Le refuge mélancolique... il me fait du bien, et après, ça va mieux ! Oui, ne t'inquiète pas... ce sont des passages nécessaires et puis on retrouve le goût des petits plaisirs simples. J'en ai ma part. Je t'en souhaite des tas... Bises étoilées.hello ligeia!!!
j'espere que sa va?ici impec ,beau temps,il fait pas trop froid!!passe une tres bonne journee ,amitié ,bisesMerci
Merci pour ton com, ton blog à l'air d'être vraiment beau je passerai partout d'ans l'après-m' quand j'aurai le temps. Bisous à toi (c'est mieux qu'un sourire ^^).oh ne t'inquiète ligeia
pas ! je ne te crains pas. tu sais à 55 ans ( j'ai pas peur de le dire)j'en ai déjà vu pas mal et moi aussi j'ai eu plus jeune des périodes très contradictoires avec ce que je suis aujourd'hui.tu sais j'ai trouvé ma vraie personnalitée à plus de 40 ans alors tu vois il y a de la marge !!! bisous à toi et bonne journéeoh
quand tu dis que l'on est comme sur une même longueur d'ondes, je confirme....c'est fou comme je me retrouve ça et là dans ce texte, ta fascination lunaire, la delectation des eaux, tu dois être une femme-enfant...tu sais que j'ai des pierres de lune dans ma collection de gemmes, j'adore les pierres, la pierre de lune, la selenite et l'opale sont mes pierres préférées...si tu te sens attirée par les étoiles, et que ce monde te donne beaucoup de souffrances, c'est peut être parce que tes vraies racines se situent ailleurs, peut être es-tu une enfant des étoiles...une âme incarnée venue d'une région stellaire pour apporter un peu de ton eau à la Terre...je t'embrasse Miss Lilimon petit
passage pour te souhaiter une bonne journée je pense que tu es au travail alors je te souhaite bon courage bises à toi@ Adrien Balboa
Oui, j'ai pas mal de pages à présent... si tu as le temps des errances ;-) Je te remercie pour le lien, j'en ai fait autant et je reviendrai par chez toi sans faute. Belle nuit et bises.@ Dit...
Bonsoir Dit, oui, ça va... je prépare un autre post un peu moins angoissé, pas d'inquiétude ;-) Sourires et merci.@ Wallis
Alors tant mieux, j'aime ta franchise et je suis contente que nous ayons échangé nos liens. A très bientôt donc, je t'embrasse.@ Miss Lili
Tes mots m'ont émue car j'y sens une compréhension qui les dépasse... car les mots ne disent pas l'essence des choses. Je t'imagine aisément en soeur de coeur ma chère, j'adore les pierres de lune et le thème si riche des eaux, je chéris leurs symboles et j'en ai fait la pulsation de beaucoup de mes textes. Nos ressentis similaires cheminant dans l'ombre pour se rencontrer subitement à un moment donné... je ne crois pas au hasard, moi. Cela me touche. Femme-enfant, sûrement... même à 30 ans ;-) J'ai longtemps cru que j'étais un lorialet, une fille d'ailleurs engendrée par la lune... J'avais écris un post à ce sujet d'ailleurs. Merci mille fois pour tes étoiles, tes émaux. Je t'embrasse.@ Tara
Coucou toi ! Oui, il m'est difficile de communiquer depuis le boulot et je découvre toujours tes passages et mes comms tardivement... Je te souhaite également une bonne soirée et bon courage pour demain. Bisous doux.33éloMercredi 14 Novembre 2007 à 19:31Le Sillon
J'ai adoré lire ton texte... cette souffrance tu as su l'écrire avec des mots très beaux... des phrases sublimes proches de la féerie... ce que je préfère ... c'est ton entrée dans ton pays imaginaire... cette envolée vers les étoiles... ce jeu de la marelle... peut être parce que cela me ressemble... vraiment... il est prenant et touchant... Bisous tout pleins éloBonsoir Ligéia
Sombre récit, et touchant. J'espère que l'araignée de la mélancolie s'en allée tisser sa toile loin de toi aujourd'hui, te laissant la voie libre pour suivre le chemin vers le rêve et la lumière. Je te le souhaite, ainsi qu'une excellente soirée. Merci encore pour tes mots et ta visite. Je t'embrasse, et à très bientôt.@ élo
Ma douce compagne... trouver tes mots ici est une fenêtre ouverte, une bouffée d'air pur, un sourire sur mon visage... Je sais que ton univers est fait de légèreté, de merveilleux et de magie... comme quoi, nous ne sommes pas incompatibles puisque nos plumes se sont mêlées. Je t'embrasse.@ LadyHawk
Oui... c'était un jour "avec" aujourd'hui, plein de sourires et de petites joies. L'une d'elle étant de te trouver en mes pages... cela faisait une éternité ;-) Tu es ici chez toi... Au plaisir de recroiser tes mots, je reviendrai te voir. Belle nuit et bises.37EldarrMercredi 14 Novembre 2007 à 22:27"me fondre aux torrents"
Je crois que ça va faire le deuxième fois ou je préfère ne pas laisser un de mes long commentaire.^^ C'est tout simplement magnifiquement écrit et très touchant. Donc chute. A lire et à relire... Au plaisir.@ Eldarr
Merci de ta lecture... personnellement, je ne préfère pas le relire trop souvent (sourire), c'est juste diablement cathartique... heureuse que tu y trouves quelque beauté. Bises.39émilieJeudi 29 Novembre 2007 à 16:31Aujourd'hui....
Bonjour, Sur les conseils d'une connaissance je viens découvrir tes mots, merci à elle qui de m'avoir guidé ici, elle se reconnaitra Ton texte me parle, il me touche, il resonne en moi...tellement fort aujourd'hui Merci Ligeia d'avoir mit tes mots sur des maux qui aujourd'hui, pourraient être les miens Bise étoilée@ Emilie
Merci de ta visite, bienvenue... ces mots ne raisonnent pas vraiment mais ils résonnent viscéralement au creux de beaucoup d'entre nous certains jours de notre vie, c'est ce qu'on m'a dit. J'espère que pour toi demain sera un jour "avec" ;-) Je t'embrasse.41kattigMercredi 9 Janvier 2008 à 13:03Bonjour Ligeia,
Nos rêves sont un peu notre sortie de secours.. Ils nous permettent d'espérer.. Car sans espoir il n'y a pas de vie réel.. Gardons notre petit coté enfant.. Fuir est un moyen de mettre à distance nos maux... Mais nos maux reviennent toujours vers nous... tôt ou tard... Souffrance, n'est ce pas une étape à passer? Je ne sais pas... Voir des êtres chers de jour en jour se mourir en se sentant incapable de l'aider... Cela détruit des part de nous même... Il arrive que l'on se dise: Pourquoi se battre? Pourquoi avancer si on doit être tout le temps être affronter au malheur, à la souffrance, au déchirement, à l'ignorance? Nous seul connaissons la réponse mais... peut-on être capable d'accepter la réponse? Il arrive que certaines personnes n'y arrivent pas... ou n'ont pas le courage...
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Cher Ligeia , En petit coup de blues, Un adulte c’est un enfant qui a perdu ses rêves, moi je veux rester un enfant . L’imaginaire est là pour dépasser toutes les frontières, vivre sans tabous loin de crève misère et au diable la moral bourgeoise. La vie est un soleil que le partage enivre de ses rayons. Je t embrasse