• Si j'étais à toi

     

    Si j'étais à toi,
    Non, je ne t'écrirais pas
    Ou sûrement pas ces mots-là
    Ces douloureux maux du vide et du manque en moi
     

    Si j'étais à toi,
    J'attendrais, nouée, le « Tu »
    Celui de tes lèvres charnues
    Déposé en offrande au souffle de ta voix


    Si j'étais à toi,
    En prisonnière volontaire
    Je m'asservirais à te plaire
    Car je jouirais de ce que tu aimes en moi
     

    Si j'étais à toi,
    Je resterais apaisée
    Après l'amour, réconfortée
    Du refuge de tes bras, je ne fuirais pas
     

    Si j'étais à toi,
    Ma vie ne coulerait pas
    Comme ce sable entre mes doigts
    Elle épouserait ces contours tracés par toi
     

    Si j'étais à toi,
    J'effacerais tes prières
    Vaines rancœurs au sel de la terre
    Au bleu ciel-de-lit je réduirais les combats
     

    Si j'étais à toi,
    De pleurs en rires aux éclats
    Nos lendemains ne seraient pas las
    De palpiter encore aux frôlements de nos doigts
     

    Je ne suis pas à toi
    Si près, si loin déjà nos deux ruisseaux de vie
    Fuguent à l'abandon leur lente mélodie
    Au hasard de ce cours qui lui seul fait sa loi

    Ligeia


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    (fragment de dessin en cours. 2007) 

    "Pour leurrer le monde, ressemble au monde ; ressemble à l'innocente fleur, mais sois le serpent qu'elle cache."

    (William Shakespeare)

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    Echidna et les femmes-serpents

    Les mythes auxquels je fais référence inscrivent la femme dans la fonction de dévoration qui est l'inverse de la naissance ; image fortement poétique sur laquelle s'articule Aurora (nouvelle d'Alain Dorémieux. Grande Anthologie du Fantastique 2. Omnibus)

    Je laisse volontairement de côté le mythe de Méduse et la légende de la Vouivre qui méritent à eux seuls que l'on s'y attarde ultétieurement. 
    La figure mythique qui est vraisemblablement à l'origine de ce type de fiction est donc celle d'Echidna (la Vipère.)
    Créature au buste parfait de femme, son corps se terminait, tout comme l'hybride de Flaubert, par une queue de serpent.
    Elle passait pour avoir enfanté le chien infernal Cerbère, l'Hydre reptilienne, le lion de Némée, l'aigle bourreau de Prométhée (auxquels Héraklès fit un sort) mais aussi et surtout la Chimère et la Sphynge.
    Mère calamiteuse de tous ces monstres, elle est à la fois constituée d'une part féminine séduisante (relative à l'Eros) et d'une part ophidienne repoussante (relative au Thanatos.) Mais les deux sont dévoratrices, aspect qui est mis en lumière dans Aurora.
    Louis Soubeyran[1] décrit lui aussi dans un article cet hybridisme mythique infernal : il évoque une race fantastique de jeunes filles extrêmement belles qui, comme les Sirènes, charmaient et attiraient les hommes.
    Cependant, elles étaient étrangement plongées dans le sable jusqu'au ventre, immobiles comme des plantes. Elles cachaient en fait un corps terminé par un serpent venimeux en guise de sexe. Dès qu'elles se saisissaient de leur proie, le sexe reptilien, animé d'une vie indépendante, se faisait bouche et mordait mortellement la victime qui était ensuite déchiquetée et dévorée simultanément par les deux orifices du monstre ; la bouche séduisante de la fille et celle du reptile.

     
    Ligeia

     


    [1] Soubeyran, L. « La femme dans le cinéma d'horreur » in. Le Féminin Fantastique, (p. 111)


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    "Avec une femme, l'amitié ne peut être que le clair de lune de l'amour."

    (Jules Renard)

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    Mélancolie lunaire

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    Crépuscule,
    Douce heure des contemplations solitaires
    Au-delà des cimes à peine découpées dans le manteau sombre des ténèbres, la pleine lune émergeait de son sommeil maladif, rouge ambrée,
    Menaçante ou blessée...
    Je l'ignorais
    Fermant mes yeux aux rares étoiles qui s'allumaient une à une, j'attendais sa rédemption, sa lumière froide et glacée qui me faisait revivre,
    J'attendais que le brouillard m'enlace et me glace,
    J'attendais la visite impromptue de quelque être nocturne
    Une brise spectrale me fit enfin palpiter. Sans dévoiler mes prunelles impatientes, je levais mes doigts et dessinais très lentement les contours d'une présence désirée sur la toile du vide nocturne.
    Dans le sillage de mes empreintes, j'imaginais alors engendrer le tissu marmoréen d'une peau
    Lèvres pincées et paupières closes, j'ombrais et soulignais avec application les reliefs de ce corps amoureux.
    Mon esprit, enfiévré par le globe écarlate de mon astre malade, ne parvenait pas à disposer les nuances de couleurs, ses couleurs... palette de pourpre et d'or, comment faire ?
    Mon œuvre se dévoilera-t-elle face à moi à la clarté blafarde de ma lune adorée ?
    Attendre encore, respirer avec nostalgie la froideur spectrale des lieux,
    Sous mes pieds humides de rosée parfumée, je sentais la puissance de cette terre qui m'avait enracinée il y a si longtemps ; et, dans ses entrailles, la sarabande effrénée et métallique de ses hôtes invisibles, patients artistes des métamorphoses.
    Frémissement des feuillages, senteurs enivrantes des marécages, viscérale communion ... mon être glacé s'électrisa
    Instant intime et onirique quand l'artiste rencontre son œuvre ressuscitée
    En une ultime et païenne prière, j'adressais à la lune mon ode des douleurs :
    « Sois mon pinceau cette nuit, revêts son corps de ta lumière diaprée, de tes clairs-obscurs violets et blafards... »
    Devant mes prunelles avides qui émergeaient enfin de leur cellule d'opale, apparut furtivement la silhouette chérie.
    Il est là, je l'ai rejoint ? Il m'a rejointe ? Peu importe... la lune bénie l'habille enfin de son éclat mauve et glacial, mon regard coule sur sa peau en ruisseaux miroitants, l'effeuille patiemment de ses nuées de brume, remonte, ravivé, jusqu'à ses bras tendus, ses lèvres si douces, ses yeux...
    Deux sentinelles froides et immobiles me fixent, crûment, impitoyablement.
    Tout autour, le fantôme fragile de ce corps que j'ai aimé et sculpté indéfiniment dans toute matière, dans tout songe, a été balayé, emporté dans un souffle de vent sinistre jusqu'au firmament.
    Ces fenêtres livides sont bien les siennes, celles de sa demeure, la seule lumière qui me le rappelle désormais avec celle de la lune.
    Il est là, c'est vrai, emmuré dans ce château, sur l'autre rive, celle des vivants.
    Parmi les éclats lunaires qui parsèment le décor, j'éclate bientôt en mille visages évanescents et je souris face à mon éternité.
    Jusqu'à la fin des temps...

    Ligeia

    Ce texte existe sous la forme d'une nouvelle plus longue... avis aux personnes intéressées.

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